La guerre des pro et des anti

Billet de (très) mauvaise humeur. Il y a quelques temps, s’informer, s’interroger, s’indigner n’étaient pas synonymes de complotisme. On pouvait même être contre sans passer pour un con. Car entre l’intelligence des uns, l’incertitude de certains, l’impertinence de beaucoup et l’indifférence des autres, il n’y avait qu’un pas, mais un pas de géant : le respect. La peur l’a exclu. Lui et la confiance. Confiance en un État, confiance en une science, confiance en un peuple… On ne s’improvisait pas sachant, on savait, on se trompait, et si on mentait, la presse rectifiait.

Aujourd’hui, tout le monde ment, tout le monde s’en fout, tout le monde y trouve son compte et tout le monde, c’est nous. La vérité ne se contredit plus seulement dans les bistrots, elle s’invente et se travestit au pupitre gouvernemental où se succèdent depuis plus d’un an les cancres de la diplomatie (statut qui exige un certain talent, tout de même), les fanatiques d’un monde nouveau qui se heurte à ses propres limites, la pupille dilatée par le prompteur et le vocabulaire réduit à une dizaine de mots…

Avant, ce n’était pas mieux. C’était juste plus rassurant. Mais avant cet avant, il y avait aussi la guerre. Aujourd’hui, on utilise ce champs lexical pour définir ce qui nous semble injuste, dangereux, mal, liberticide. Dans tous les camps. Celui des pro tout, celui des contre tout et celui des gens qui doutent. On a un président qui parle de guerre pour parler d’un virus. Des anti vaccins qui arborent une étoile jaune pour dénoncer cette obligation. Tous ces imbéciles qui multiplient les insinuations grotesques et les parallèles intolérables. Puis il y a ces gens qui, comme moi, ne supportent pas ce monde moderne et aimeraient justement que ces gens-là la vivent, cette guerre. Même si cette crise a révélé bien des états d’esprit, entre dénonciations et calomnies.

Alors maintenant, on nous explique que notre corps ne nous appartient que lorsqu’il s’agit d’avorter. Que mourir dans la dignité, c’est mourir piqué. Mais que pour le bien de tous, on devrait le soumettre à la science. Sauf que même les scientifiques ne sont pas d’accord entre eux. Parce que le progrès n’est pas l’assurance. Parce le doute est permis, normalement. Et que sans le doute, fondamentalement, la science n’existerait pas. Alors c’est quoi, la vérité scientifique ? Qu’est-ce qui est bien ? Qu’est-ce qui est mal ? Peut-on seulement être juste ? Et arrêter d’agir par peur, mais consentir au devoir ? L’Histoire ne nous apprend pas où se situent ces curseurs. Elle nous indique simplement que le devoir épouse rarement le consentement de la masse lorsqu’elle se dope à la crainte.

Il y a un an, tout le monde dénonçait les incohérences et les contradictions de cette gestion de crise calamiteuse. De temps en temps, on les pardonnait. Mais l’idée d’être réduits à des animaux qu’on fout en cage au nom de la santé publique ne nous semblait pas naturelle. Puis elle l’est devenue. On s’habitue à tout.

Il y a un an, tout le monde était contre le passe sanitaire. Y compris Olivier Veran. Y compris Emmanuel Macron. On s’habitue à tout, vous dis-je, surtout quand on a peur.

Depuis un an, des dizaines de milliers de Français sont morts du Covid. Des centaines de milliers d’autres sont morts de bien d’autres maladies. Vous n’aimez pas cette comparaison mathématique, hein ? C’est vrai, c’est incomparable. Il faut dire que certains investissements rapportent moins que d’autres.

Alors oui, c’est odieux de réagir comme ça. C’est immonde de ne penser qu’à soi. C’est terrible de laisser la parole aux cons. Mais c’est ça, la démocratie. Et quand on me dit que ces mesures ne sont pas totalitaires parce que la définition de ce mot ne correspond pas aux circonstances, je me demande ce qu’il faut de plus pour reconsidérer la situation avec honnêteté, sans cette influence morbide qui nous rend fous.

Je me demande ce qu’il faut de plus pour illustrer ce mot. Et je pousse cette interrogation au-delà des frontières de la bien-pensance : qu’est-ce qui a changé en un an et demi ? Et a-t-on seulement levé le bout du nez, juste une seconde, pour arrêter de compter les morts sur le bout des doigts comme des maternelles devant leur ardoise, et constater que ce virus a fait un nombre dramatique de victimes vulnérables, mais si peu de victimes aux profils parfaitement sains ? Peut-on seulement recueillir toutes les informations dont on nous agonit depuis des mois sur l’efficacité, et l’inefficacité de ces vaccins qui protègent et ne protègent plus contre le Covid et ses variants ? A-t-on encore le droit de justifier notre opposition sans passer pour des impies de mauvaise foi ?

Enfin… Je file un rencard aux bourreaux. Dispo pour gravir l’échafaud.

Maud PROTAT-KOFFLER

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