Tribune. Diviser la France et unifier l’Europe, élever le verbe et soigner les maux… Pour illustrer cette tribune, les figures de style ne manquent pas. Emmanuel Macron a épousé les lettres et voici qu’il accouche d’un éloge romanesque destiné à reconduire, semble-t-il, l’espoir français et le mythe européen. Il lui faudrait réinventer un équilibre entre le grand écart intellectuel et la rigidité diplomatique dans une situation nationale ironiquement instable. A quoi bon reconquérir l’Europe quand le désordre bouleverse son propre pays ? Gagner le monde et se perdre soi-même est une ébauche chrétienne devenue celle d’un système conventionnel, sans évangile et visiblement victime d’un daltonisme irrépressible. Pour reconstruire l’Europe, décrochons effectivement les étoiles en leur rendant indépendamment leur identité, sans laquelle la dictature de la pensée unique n’achèvera jamais d’échauffer les mouvements populaires. La fusion des cultures et l’éloge des valeurs communes, ça va bien un moment.
Dans ce sens, Emmanuel Macron évoque la refonte de l’espace Schengen et la mise en valeur des productions européennes. Il conviendrait en effet de pouvoir rétablir les frontières sans passer pour d’odieux protectionnistes. Certains construisent des murs, nous, on se contente de ne pas dormir la porte ouverte. Toutes les immigrations ne se valent pas et les milieux ruraux nous en disent long sur la décommunautarisation française au profit de minorités identitaires. Il faut relire La France Périphérique de Christophe Guilluy, un visionnaire. Car ce ne sont évidemment pas quelques sociologues de plateau comme Sylvain Boulouque qui oseront aligner deux critiques sur la situation déplorable de la ruralité française. La France s’ignore et s’idéalise. Rongée par un cancer social, elle se distingue pourtant auprès des autres peuples comme force salvatrice en adressant des lettres d’amour… Tiens, ça me fait penser à Cyrano de Bergerac : « Et de lettres vous n’avez que les 3 qui forment le mot : sot ! »
Maud PROTAT-KOFFLER
