Noir c’est noir. Difficile d’évoquer une diversité que l’on nomme, que l’on dénomme, que l’on idéalise, que l’on exploite à outre mesure et sur tous les tons possibles…
1958, 1998, 2018. Trois dates intimement liées à l’actualité pour saisir l’étymologie idéologique du mot « race. » Il y a 60 ans, l’article premier de la Constitution se conjuguait en ces termes : « [la République] assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. » En 1998, l’équipe de France de football remporte sa première étoile. Sur les Champs-Elysées, les pavés restent encore en place et les couleurs ne touchent pas le sol. La France tricolore fraternise loin des revendications multiethniques et ne se reconnait que dans l’exploit sportif de ses joueurs. Puis, vint le temps des repentances. En 2018, l’Assemblée Nationale bannit la « race » des écritures et du système de pensée, tandis que les adeptes du « vivre ensemble » – sorte de collé-serré inavoué – l’érigent en fanion artificiel pour justifier les atouts de l’immigration. Les antiracistes n’ont décidément aucune cohérence. « C’est qu’au fond, il n’y a qu’une race : l’humanité », pensait Jean Jaurès. On aurait pu en rester là. Mais les discours évoluent et l’idée originelle de se soustraire à toute discrimination raciale n’a plus grand sens. Les mâles blancs en savent quelque chose.
Le poids des mots
« L’Afrique a gagné la coupe du monde ! » Carton rouge pour le tacle du président vénézuélien Maduro contre lequel le président UDI Jean-Christophe Lagarde compte d’initiative porter plainte. Revendiquer la diversité éthique de l’équipe de France, oui. Mais n’abusons pas trop de la liberté de parole, surtout si c’est pour contester une diversité adulée pour quelques jours, grâce à quelques joueurs et portée par quelques voix encore enrouées par l’inhalation de gaz lacrymogènes, dimanche soir. On entendra aussi tous ces discours écrits d’avance à propos de l’incontestable richesse que nous apportent ces joueurs venus d’ailleurs. Reconnaissons tout de même qu’ils ont été éduqués, formés et cultivés par un certain Didier Deschamps, soucieux de jouxter valeurs sportives et républicaines. En cela, le pari français est gagné. « Regardez l’équipe de France qui vient de remporter la Coupe du Monde ! Tous ces garçons ne ressemblent pas, selon moi, à des Gaulois ! Mais ils sont Français ! » Carton multicolore pour Barack Obama qui met la race en avant sans la citer, mais se rattrape en honorant l’identité après l’origine.
La légitimité revient finalement aux joueurs. Ce sont eux qui lancèrent la Marseillaise sur le perron de l’Elysée. Ce sont eux qui incarnent aujourd’hui les valeurs du football français et d’une nation unie. Condensé de déclarations ferventes :
Paul Pogba : « C’est ça la France. On se sent tous Français, on est heureux de porter ce maillot, heureux d’avoir la culture française, d’avoir grandi en France. Elle est belle comme ça, c’est comme ça qu’on l’aime et on l’aimera toujours. »
Antoine Griezmann : « Il faut être fier d’être français, on le dit très peu. On est bien en France, on mange bien, c’est un beau pays. On a une belle équipe de France, des beaux journalistes. Il faut être fier d’être français. Je veux dire à quel point je suis fier d’être français. Je veux que les jeunes se disent fiers d’être Français, j’aime la France, j’aime la République. »
Blaise Matuidi : « La diversité des origines est à l’image de ce beau pays qu’est la France. Pour nous, c’est super. On a un beau pays, on est fier de représenter ce beau maillot. C’est quelque chose de génial. Je pense que le peuple est fier d’avoir une équipe nationale comme ça. On représente fièrement l’équipe de France et la France. »
Maud PROTAT-KOFFLER
