Ils sont toujours là, fidèles. Certains se sont fait tatouer le nom et le visage de leur idole, comme s’ils pouvaient oublier. D’autres allument une bougie chaque soir sur le rebord de la fenêtre. Le deuil est long, le deuil est pénible… Et le temps ne suffit plus à taire le chagrin.
« Je n’y arrive pas », « J’aurais aimé partir avec lui », « Reviens, Johnny »… Un mois – déjà – après sa disparition, les millions de visages et de larmes à peine essuyées (cf Un Dimanche de Janvier) cherchent encore une consolation. Le temps ne résout rien. À la Madeleine, les dévots de l’idole fleurissent les marches et entretiennent le lieu avec amour. Sur Facebook, 15 000 fans échangent jour et nuit dans un groupe intitulé « Johnny Hallyday for ever ». Ils ont compris qu’ensemble, l’épreuve serait moins dure.

Pour ceux qui ont écrit leur vie entre les lignes de ses chansons, le point final est un calvaire. Ils ne vivent plus que pour pleurer. Johnny s’éteint, Hallyday brille et sa voix berce les oubliés. En vérité, nulle thérapie ne soigne cette blessure. Pour eux, Dieu est mort. Et ce ne sont pas les quelques tee-shirts et autres goodies dont internet regorge depuis le 6 décembre qui combleront ce manque. Johnny ne s’imite pas.
Il était à la fois homme, à la fois Dieu. Sa croix, il la portait sur son cœur et dans son corps. Abîmé par les années, ravagé par le tabac, détruit par lui-même. Johnny, c’était l’inimitable imité par quelques millions d’hommes et de femmes à ses pieds.
Il était la voix de ceux qui ne savent pas dire je t’aime. Il était le cœur de ceux qui l’avaient abîmé. Il était le compagnon de tant d’âmes délaissées. Tout ça, c’était lui aussi. Le chanteur abandonné. L’orphelin de la Trinité.
Johnny, un père divin
A défaut d’entrer au Panthéon, Johnny sera donc sanctifié. Pendant un an, l’église de la Madeleine honorera l’idole une fois par mois lors d’une messe célébrée à son intention. Qui l’eut cru ? Sûrement pas lui.
Johnny croyait en Dieu et exhortait son entourage à avoir foi en la vie. Il était finalement le dernier missionnaire, le dernier rockeur et le dernier amour d’une France qui ne croit plus en rien.
Si ses fans pleurent encore, c’est parce qu’il s’est donné à eux de la scène à la mort. Sa vie vaut bien une Bible, sa mort vaut bien une messe, ses fans valent bien plus que tout.
Johnny Hallyday, c’était un puit d’amour dans un corps martyrisé.
Maud PROTAT-KOFFLER
