La culture, éternel chantier en constante évolution, semble ne faire parler d’elle que lors d’échéances électorales. Les débats opportuns, allusions symboliques et précaires à l’exception culturelle française, ne font pas sourire le maire de Versailles. La culture ne se récupère pas, elle s’entretient. François de Mazières livre donc un manifeste de la culture, Le grand gâchis culturel, convenant d’une dizaine de propositions à travers lesquelles il entend remettre le sujet au cœur de l’action publique.
Y a-t-il une banalisation de la question culturelle en France ? « Je suis très attaché au fait de ne pas avoir des visions simplificatrices de la culture. Ce n’est pas un sujet secondaire. » déclare le maire de Versailles. François de Mazières a en effet la légitimité du dialogue culturel. Orateur d’excellence, gardien du patrimoine versaillais depuis 2008 et président de la Cité de l’architecture et du patrimoine (CAPA) de 2004 à 2012, l’actuel député des Yvelines n’hésite pas à dénoncer l’inconsciente ignorance que suscite le débat culturel. Le monopole de la culture n’est ni à droite, ni à gauche. Il dépasse les idéologies comme il dépasse les âges. Mais aujourd’hui, la culture est assimilée au conservatisme et l’identité qu’elle défend est suspectée de reclure les libertés.
François de Mazières déplore la politique des budgets sacrifiés du quinquennat de François Hollande. Le prochain candidat sera amené, selon lui, à prendre en compte pleinement la question culturelle. « L’un des défauts de la période qu’on vient de vivre, c’est qu’après avoir dit que la culture était essentielle, on en a plus entendu parler. Ce qu’il faut éviter, c’est d’avoir une politique hypocrite par rapport à la culture. Ça n’est pas juste un lien entre les gens ou un appas pour l’électorat. »
Le débat présidentiel démontre en effet le malaise du statut de la culture aujourd’hui. La culture devient un concept. Le maire de Versailles ose même le lien avec « la politique bête » de Twitter : « De la politique de terrain, ça va plus loin que 140 caractères. On ne peut pas parler des choses au fond. Il faut se méfier de cette dérive qui joute en faveur de cette incompréhension que les gens ont les uns vis-à-vis des autres. La montée des tensions est aussi liée à cette forme de communication, on demande aux gens de faire la petite phrase assassine qui va être partagée. » La société du zapping exclut la continuité politique…
Diffuser largement et utilement
Tout le monde doit avoir accès à la culture. Mais il faut être prudent et ne pas tomber dans la simplification qui consiste à dire « on va donner la culture qui fait plaisir ». François de Mazières déplore par exemple « la connaissance de la musique réduite à la fête de la musique ». L’art devient banalité et la banalité devient un art. L’association d’idées et de hasards devient une invention. In fine, on se contente du peu pour éviter le rien. Mozart, Molière et Montaigne ne deviennent que références et obligations scolaires.
A ce stade de l’échéance électorale, seul Emmanuel Macron s’engage à valoriser l’accès à la culture en proposant une somme de 500 euros pour chaque jeune (soit 400 millions d’euros). « Si on avait les moyens, pourquoi pas ? Mais le vrai moyen, ce n’est pas à 18 ans, c’est en CM2, je le sais d’expérience. C’est un âge extrêmement réceptif où l’on ouvre les gens à la culture. A cet âge-là, on n’a pas peur de monter sur une scène de théâtre. », regrette t-il. Le maire LR n’hésite pas à exprimer ses regrets vis à vis du programme de son candidat, François Fillon, devant « la facilité » du candidat d’En Marche!. « On en reprend pour 5 ans… 5 ans d’indifférence culturelle. »
Le Grand Gâchis Culturel, François de Mazières – Olivier Le Naire, 216 pages, 15 euros.
Maud PROTAT-KOFFLER
