Elle est la première cathédrale gothique de France (consacrée en 1163). Saint Etienne de Sens est un joyau de l’architecture française et son histoire accompagne l’imposante structure qu’elle déploie. Délabrée puis détruite, ressuscitée à plusieurs reprises, l’édifice tient en son choeur les souvenirs désastreux d’incendies et de guerres. Pourtant, pas une pierre n’a bougé.

Tout est démesuré, comme si ces murs devaient accueillir quelque chose d’infiniment plus grand que l’homme. Dehors, la façade annonce le mystère d’une dimension inconnue. Les cicatrices incrustées dans la pierre de chaque côté des portes indiquent un passage historique à la fois fondateur et destructeur : la Révolution Française. Les têtes tombent, l’Histoire passe mais Saint Etienne demeure.

Les portes s’ouvrent enfin, le temps s’arrête : le mystère s’annonce.
Ici, on distingue le tourisme du sacré. Pas d’affiches, pas de machines à souvenirs, la cathédrale Saint Etienne de Sens (de son vrai titre cathédrale métropolitaine et primatiale Saint-Étienne de Sens) et son histoire se suffisent à elles-mêmes pour attirer les curieux. Les murs s’envolent, les vitraux s’élèvent et laissent entrer une lumière presque divine. D’un bout à l’autre de la nef, tout n’est que recueillement et contemplation. Rien ne dévie le regard, tout se suit parfaitement dans les lignes de la pierre venue de loin. Le regard est immédiatement porté vers les voûtes en croisées d’ogives dont la hauteur atteint les 24,4 mètres, tant dis que la nef, large et lumineuse, se déploie sur 15,25 mètres de largeur contre 13,5 à Paris. Autant rappeler que pour l’époque, c’est un exploit.
Outre ces chiffres compétitifs, la cathédrale tient sa grandeur et sa flamboyante prestance de quelques noms sacrés qui réussirent à protéger l’édifice de ses nombreuses attaques. Les travaux débutent en 1135 et la cathédrale est consacrée en 1163. Entant que première grande cathédrale gothique de la chrétienté, son influence est importante. L’énergie et les moyens déployés sur plusieurs siècles l’attestent.
En 1164, l’archevêque Henri Sanglier procède à la consécration d’un premier sanctuaire par le pape Alexandre III. En 1268, l’effondrement de la tour sud détruit la plus grande partie de la façade occidentale, nécessitant alors sa reconstruction. Entre 1490 et 1517, l’archevêque Tristan de Salazar entreprend la construction d’un grand transept dans le style gothique flamboyant, dont les travaux sont confiés à Martin Chambiges. L’édification du sanctuaire s’étend ainsi sur une période de quatre siècles.
L’édifice connaît de nombreuses détériorations ainsi que des réaménagements d’époque : l’orgue est déplacé, des vitraux sont remplacés, le sol est recouvert de pavé… En 1793, l’armée marseillaise saccage toute la statuaire de la cathédrale. Les chapelles latérales sont remplacées.

Sur ces histoires repose aujourd’hui un chef-d’oeuvre gothique flamboyant incrusté d’une persévérance humaine exceptionnelle. La cathédrale de Sens accueille enfin le mariage de Saint Louis, le 27 mai 1234, célébré par Gauthier de Cornu, archevêque de Sens.
L’histoire et l’architecture de la cathédrale sont à retrouver sur place via des visites audio-guidées.
Sens (Yonne), 89100.
Maud PROTAT-KOFFLER
